Anne Gass, diplomée de la Clinique du Coureur

La Clinique du Coureur : halte aux croyances !

La course à pied est l’un des sports où il y a le plus de blessés… Vous vous en rendez compte ?
Est-ce que nous sommes faits pour courir ?
En cas de blessure, vers qui se tourner ?

Voyons cela avec Anne Gass, kinésithérapeute à Strasbourg, et spécialisée dans la course à pied grâce à la formidable Clinique du Coureur !

Comme d’habitude, je vous conseille l’audio.

Cependant, la version texte est disponible ci-dessous.

Anne Gass, diplomée de la Clinique du Coureur

Bonjour, Anne Gass.
Qui es-tu vraiment ?
Pourquoi t’intéresses-tu à cette personne bizarre qui court partout, pour finir par revenir souvent au même point en ayant mal partout ?

Anne Gass :
Je suis en effet kiné à Strasbourg, diplômée depuis maintenant un bon bout de temps.
J’ai une maman qui était athlète de très bon niveau, et un papa très impliqué dans la course à pied aussi.
On a toujours un peu baigné là-dedans.
Même si plus jeunes, mon frère et moi avons fait bien autre chose que de la course à pied.
Mais la passion nous est venue des parents.

À un moment donné, je me suis dit : pourquoi courir pour rien ? C’est hyper ennuyeux !
Alors je me suis tournée vers d’autres sports, j’ai commencé le basket.
Quand on a besoin d’endurance, il n’y a rien de plus facile que d’aller courir pour se préparer.

Donc j’ai continué à courir un peu, mais sur des petites distances, en complément.

Il y a de ça trois ou quatre ans, on a eu une collègue copine kiné, qui nous a envoyé les infos de la Clinique du Coureur en nous disant : tiens ça a l’air pas mal cette formation.

On s’est embarqués dans la Clinique du Coureur : formation de deux jours plus une journée de formation pratique professionnelle, dans un premier temps.

Nous avons eu une conférence de la part de Blaise Dubois, le dirigeant de la Clinique du Coureur.
Il a bousculé beaucoup de nos croyances sur la course à pied.
Certaines croyances que j’avais depuis toute petite à travers mes parents athlètes.

Ça m’a vraiment parlé.

Je me suis embarquée dans la formation plus longue et j’ai poussé jusqu’au titre d’expert 2.0 délivré par la Clinique du Coureur.
Je suis partie une semaine au Québec pour suivre cette formation.

As-tu des exemples de croyances que tu avais et que la Clinique du Coureur a remis en question ?

Anne Gass :
Depuis toute petite, j’ai toujours couru en attaquant du talon, en faisant beaucoup de bruit. Ma maman me disait de faire moins de bruit !
Je n’allais courir qu’une heure, parce qu’après, j’avais mal partout !

Ça ne me serait jamais venu à l’idée de courir plus. Quand je voyais à la télé les gens qui couraient le marathon je me disais : mais ce n’est pas possible !

Il y avait plein de choses comme ça… Y compris la grosse chaussure avec un bel amorti.
Avec la conférence, ça a été bousculé.
Courir au naturel ? Après tout, nous ne sommes pas nés avec des chaussures au pied…

Il y avait pas mal de données dans ce style-là.
Le sport est important pour la santé.
Et aujourd’hui, les études le prouvent : en plus d’être important et bon pour soi, c’est aussi un facteur de diminution des pathologies comme les maladies cardiovasculaires.
Donc finalement, en plus d’être sympa, c’est aussi bon pour la santé.
Donc pas mal de choses comme ça que je ne connaissais pas avant d’aller faire ma formation.
Ça m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses.

Et concernant l’aspect technique, on se rend compte que lorsqu’on reçoit en cabinet un patient, on se dit : là, ce n’est peut-être pas la meilleure façon pour lui de courir, et c’est pour ça qu’il est blessé. Ou alors, c’est qu’il n’a pas la bonne chaussure au pied.
Pouvoir faire le lien…

Logo de la Clinique du Coureur

Pourquoi tes croyances ont-elles été bousculées ? L’école de kiné n’a pas suffi ? Comment ça se fait, qu’une professionnelle ait besoin d’une formation spécifique, après les trois ans d’études nécessaires pour devenir kiné ?

Anne Gass :
C’est surtout parce que, trois ans, ce n’est pas si long, surtout quand on voit tout ce qu’on peut rencontrer dans le domaine de la santé.
On est formés à des techniques de rééducation bien précises : rééduquer une épaule, une entorse de la cheville …

Les blessures on les voit en école de kiné.
On a les traitements pour.
Mais par contre, ça ne nous permet pas de rechercher la cause des problèmes, qui peut nécessiter d’agir à un autre endroit que là où est située la blessure.

C’est pour ça que nos formations complémentaires nous permettent à un moment d’élargir nos pratiques et de nous poser des questions.

Lorsque j’ai un coureur qui me dit qu’il a une blessure – comme toi, tu pouvais avoir par exemple – si je m’en tiens à ce que j’ai appris à l’école, je vais aller voir ton pied et je vais m’arrêter à ton pied .

Je ne vais pas me poser les questions :
Est-ce que tu avais une paire de chaussures non appropriée ?
Est-ce que tu n’avais pas une façon de courir qui a pu poser un problème ?

Je ne l’ai pas appris à l’école.
Je l’ai appris avec la Clinique du Coureur. Par exemple, le fait de faire une analyse biomécanique de la foulée.

Dans ce cas-là, tu recherches les points qui peuvent être importants.
Il faut être spécialisé dans la course à pied et, clairement, nos études sont plutôt générales.
On ne nous apprend pas à regarder une personne courir.

Tu as d’autres compétences. En quoi est-ce lié à ton métier ?

Anne Gass :
J’ai fait une formation de kinésithérapie du sport, dirigée vers tous les sports confondus. La course à pied, je l’ai fait plus par intérêt.

Ensuite j’ai une formation de viscérale et de nutrition.
C’était vraiment pour compléter la prise en charge des sportifs et des patients autres que je peux avoir au cabinet. C’est plus personnel : j’estime que ce qu’on mange nous définit et que, mine de rien, ça peut avoir une incidence sur des pathologies ainsi que sur nos blessures.
Donc, c’était pour compléter mon champ de compétence.

On parle régulièrement d’alimentation sur Courir Un Trail.
Quelle serait l’alimentation idéale pour ne pas se blesser ?

Anne Gass :
Je ne vais pas forcément donner un menu spécial.
La clé est de s’alimenter de façon équilibrée et variée.

Ensuite, on arrive souvent à identifier les aliments qui nous font du bien de ceux qui ne le font pas.

S’hydrater, surtout pour les coureurs, est une question très importante.
Mais ne pas trop s’hydrater non plus, c’est aussi important parce qu’il peut y avoir d’autres risques physiologiques pour l’organisme lorsqu’on s’hydrate trop.

Ce qu’on voit d’ailleurs souvent sur les marathons et sur les longues distances.

Je ne vais pas rentrer dans les détails, cela serait trop long, mais simplement avoir une hygiène de vie saine en mangeant équilibré.

Mais, parfois, lorsqu’on s’interroge quand on a des problèmes au ventre, de digestion, sur des périodes de course ou sur des entraînements, ça peut être intéressant de consulter quelqu’un qui est spécialisé dans ce domaine pour se faire diriger.

En effet si on mange gras toute une semaine ou des repas très lourds ou qu’on boit de l’alcool, nos entraînements peuvent devenir difficiles.

Autour de moi, dans le monde des coureurs, j’ai l’impression que c’est une fatalité, la blessure. Forcément sur une saison, sur deux ans, on va se blesser.
Courir c’est dangereux, contre-nature et il faut forcément payer le prix et se blesser, non ?
À qui la faute ? À quoi ?

Anne Gass :
Pour moi, courir n’est pas dangereux, le tout est de le faire d’une manière adaptée, car nous sommes tous différents.

Courir n’est pas censé être mauvais.
Le problème, c’est qu’une fois qu’on est blessé, on s’arrête tout de suite.
Une blessure aux membres inférieurs est embêtante, et nécessite souvent l’arrêt total de la course.
C’est pour ça que c’est aussi fatal pour certains coureurs, surtout en période de compétitions.

Il faut savoir qu’en termes de prévention de blessures – ce qui est la base de ce qu’on fait avec la Clinique du Coureur – s’il y a une blessure, c’est qu’il y a forcement une surcharge tissulaire quelque part.
C’est-à-dire qu’il y a un tissu dans le corps humain qui a été mis en surcharge dû à un entraînement, dû à des facteurs externes ou internes, donc possiblement aussi dépendre de l’alimentation et de l’hydratation.

Mais aussi, dans les facteurs externes  : les changements de terrains, de surface pour lequel le corps n’est pas adapté ou une erreur d’entraînement, par exemple.

Tous ces facteurs-là peuvent souvent être à l’origine des blessures.
Garder en tête que c’est souvent trop vite trop fort, qui peuvent nous amener à nous blesser, donc à provoquer cette fameuse surcharge tissulaire.
Quand tu demandes les blessures, à qui la faute : c’est souvent la faute du coureur.

Malheureusement !
C’est rarement la faute de quelqu’un d’autre.
Ne pas arriver à être progressif, ne pas arriver à y aller doucement et vouloir en faire trop, trop rapidement pour atteindre certains objectifs.
La non-progressivité, c’est la cause principale des blessures chez les coureurs.

Et le changement de chaussures… Parce qu’on a entendu qu’il existe quelque chose de mieux, on essaie une nouvelle paire, sans être progressif… C’est aussi un facteur de blessure.

Les blessures, une fatalité ?

Mais si c’est notre faute, c’est positif !
Ça veut dire que c’est de notre responsabilité, et qu’on peut agir dessus.

Anne Gass :
Exactement.
On peut essayer d’agir dessus.
Le mieux, c’est de se faire guider parce que les blessures sont souvent assez importantes et peuvent être facteurs d’arrêt.
Les coureurs d’aujourd’hui n’ont pas forcément les mêmes connaissances que nous, et on n’en parle pas forcément dans les médias. Nous avons un rôle à jouer.

Il y a tout un courant qui apporte beaucoup d’importance aux différentes marques et modèles de chaussures.
D’ailleurs, chaque année, il y a de nouveaux modèles de plus en plus perfectionnés qui sortent.
J’ai interviewé Jean-Louis Valderama (16 000km en crocs), Christian Harberts ou encore Bruno Redon (tout deux coureurs pieds nus).
Ce sont des gens qui ont remis en cause, souvent après une blessure, la belle histoire de la chaussure protectrice.
Mais pour certains coureurs c’est très important voire même synonyme de performance.
« Ce sont les chaussures qui font le coureur »
Où est la voix du sage ?
Comme tu l’as dit, nous ne sommes pas nés avec des chaussures…

Anne Gass :
Exactement.
Aujourd’hui, selon les études, la chaussure est tout de même la principale influence biomécanique qui peut engendrer des blessures.
Donc, il faut bien les choisir en fonction de la volonté de chacun, du niveau et du coureur lui-même.
Car tout le monde ne courra pas avec les mêmes chaussures.
C’est bien le problème des grandes marques qui nous vendent la chaussure révolutionnaire que tout le monde doit prendre. Ce n’est pas possible.

Il n’y a pas d’incidence de la pose du pied sur la chaussure, contrairement à ce qu’on entend assez souvent.

Par contre entre une chaussure minimaliste et une chaussure maximaliste – une grosse chaussure, il y a clairement une différence.

Les études aujourd’hui ne nous disent pas s’il y a une chaussure qui est meilleure, s’il faut privilégier l’une ou l’autre.
Le peu d’études scientifiques sur le sujet ont souvent des biais commerciaux, issus des laboratoires de grandes entreprises qui promeuvent leurs propres chaussures.
C’est alors un peu compliqué de se dépatouiller là-dedans.

Ce qu’on sait aujourd’hui, c’est qu’une grosse chaussure peut clairement influencer la biomécanique sur différents aspects.

Elle peut aggraver la façon d’attaquer avec le pied.
Elle protège plus le pied, mais, du c
oup, fragilise les tissus, ce qui peut justement engendrer des problèmes voire des blessures si on change de chaussure trop vite, par exemple.

La chaussure minimaliste, qui est de plus en plus répandue aujourd’hui, est ce qui se rapproche le plus de courir au naturel, donc pieds nus.
Ce qui peut être intéressant.

Après, il faut toujours garder en tête que lorsqu’on veut changer de chaussures, le point numéro un est la progressivité, donc s’y adapter doucement.

Essayer, pendant plusieurs semaines, d’adapter sa chaussure à soi.

Pour le choix de la chaussure, il s’agit aussi de considérer l’âge, le confort, le respect de la longueur de la forme et de la taille du pied.
C’est très important de trouver la chaussure qui nous va bien.

Et pour cela, il faut aussi savoir comment on se chausse dans la vie active, nos antécédents, comment on s’est chaussé jusqu’à présent… Et son niveau en endurance et en course à pied, la présence ou non de blessures.

Beaucoup de facteurs… Donc le mieux est d’être conseillé par un professionnel.

En l’absence de problèmes, une chaussure simple, souple et légère, qui se rapproche du pieds nus, pourquoi pas…

Finalement on peut aussi courir pieds nus, sans rien, et ça à l’air de fonctionner.
Je pense que c’est ce qui est ressorti de tes interviews avec des coureurs pieds nus.

Donc c’est possible.
Donc, pourquoi forcément se chausser avec des grosses chaussures si on peut aussi en avoir des plus simples, plus légères ?

Il faut savoir aussi que la chaussure minimaliste est gage de performance.
Souvent, on la conseille quand on veut progresser et performer dans certains domaines.

En tout cas, il ne faut pas passer d’une chaussure maximaliste à une chaussure minimaliste sans transition.

Anne Gass :
C’est le point numéro un à garder en tête : être progressif, quoi que tu fasses.

En course à pied, si tu commences, y aller progressivement.
Si tu changes de chaussures, y aller progressivement.
Si tu peux changer ta biomécanique, toujours y aller progressivement.
C’est la clé.

La chaussure miracle n’existe pas, alors !
Au niveau des étirements, chez les coureurs c’est rarement apprécié.
On entend tout et son contraire, il y a des effets de mode : pas avant, pas après, c’est dangereux, ça ne l’est pas…
Alors d’un point de vue scientifique, de ton point de vue, où est la place des étirements ?
Faut-il en faire ? Et quand ?

Anne Gass :
Des étirements profonds pour gagner en souplesse, c’est important, mais toujours à distance d’entraînements ou à froid, tout simplement.

Il y a des étirements qui peuvent être intéressants pour se préparer ou pour augmenter un peu les performances pendant la course .
Ce sont les étirements rapides ou la pliométrie qu’on peut faire avant la course.

Ce sont des étirements rapides que l’on tient six secondes et où on active les articulations.
Cela rentre dans l’échauffement pour permettre de bien se préparer pour la course

Il existe aussi  un type d’étirement pour les coureurs qui sont blessés dû à des raideurs. Ils peuvent avoir des points qui vont se réveiller à certains endroits du corps pendant les courses.
Ces athlètes sont vraiment une catégorie bien précise. Ça peut être intéressant qu’ils s’étirent avant, dans le but justement, d’assouplir la structure qui peut gêner pendant la course.

C’est toujours pareil, comme je l’ai dit avant, le mieux est d’avoir l’avis d’un professionnel, pour ce type-là.

Nous les orientons vers les étirements correspondants.
L’idée générale à retenir est que les étirements servent à gagner en souplesse en dehors des séances ou alors les étirements courts avant une séance pour se préparer à aller couri .

Existe-t-il des coureurs qui n’ont pas la nécessité de s’étirer et qui peuvent courir des années, des dizaines d’années, sans soucis ?

Anne Gass :
C’est une bonne question.
Est-ce qu’il y en a ?
Je ne pourrais pas te dire.
Je pense qu’il y en a, mais je ne suis pas sûre que, sur le long terme, le résultat soit probant.
Mine de rien, la souplesse reste quelque chose d’important et si on ne la travaille, pas malheureusement ça peut amener à des soucis.

J’ai vu beaucoup de coureurs au cabinet dont les blessures étaient liées à un problème d’hygiène au niveau des étirements en dehors des courses ou des raideurs qui les gênaient pendant les courses.
Ça se règle juste avec un peu de souplesse.
Je n’en ai pas encore vu qui le vivaient bien sans étirements complets.

Je reste spécialisée en prévention des blessures, donc c’est quand même quelque chose que je conseille.

Je ne peux pas prévoir quelqu’un qui va se blesser, je ne peux pas le savoir en avance que quelqu’un va se blesser.

C’est plus dans l’idée de la prévention que les étirements peuvent être intéressants.
C’est plus un conseil à garder pour pouvoir se sentir bien en course et prévenir certaines blessures.

Mais comme dit, je ne peux pas savoir si ça va être le cas ou pas.

Quand j’étais venu à ton cabinet, tu m’avais dit que c’est important lorsqu’on fait de la course à pied d’avoir le reste du corps un minimum musclé.

Anne Gass :
Exactement.
Le renforcement est très important, surtout pour la technique de course.

Pour améliorer sa technique de course, c’est vraiment important de stabiliser son tronc et de travailler sur des exercices de renforcements et par là, aussi, prévenir certaines blessures dues à des problèmes de dos, notamment.

En général, c’est plutôt la stabilité du dos qu’on travaille.
Selon notre technique de course, il y a quelques muscles spécifiques intéressants à renforcer
Surtout pour les personnes qui voudraient se mettre à la course à pied, n’en ayant jamais fait.

Comme dans tout sport, en course à pied il y a une technique à avoir, sinon on peut se blesser.

Au basket, on apprend à tirer, à jouer, il faut un peu de technique.
Pour acquérir la technique, parfois, ça passe par du renforcement.

Ça peut être aussi un élément à travailler en termes de prévention.

C’est essentiellement du gainage qu’il faut faire ?

Anne Gass :
Du gainage pour le renforcement des abdos.
Gainage du tronc.
On peut aussi renforcer les quadriceps et les mollets, selon comment on court.

Les ischio-jambiers peuvent aussi être importants.
Ce sont des groupes musculaires qui sont très sollicités et qu’on peut être amené à renforcer.

Quels sont les choix qui ont fait de toi ce dont tu es devenue?

Anne Gass :
Il y a, en grandes parties, mes études.
Le choix de devenir kiné a été déterminant pour beaucoup de choses auxquelles je m’intéresse aujourd’hui.
Ça m’a permis d’élargir mes compétences, avec la nutrition et la micro-nutrition, par exemple, dans lesquelles je me suis formée. À la base, c’était clairement pour moi, et non pour mon travail.

C’était pour m’ouvrir à un nouveau domaine, pour changer ma manière de m’alimenter. Ma profession m’a permis de m’ouvrir à un tas de choses auxquelles je ne me serai peut-être jamais intéressée.

Mes études m’ont ouvert l’esprit sur beaucoup de choses, en tant que profession de santé tournée vers le sport et donc vers l’hygiène de vie.

Beaucoup de choses dans ma pratique m’ont permis de changer des éléments dans ma vie personnelle.

Et le choix des sports que j’ai pu faire dans ma vie a été aussi déterminant.
Le basket, que j’ai exercé pendant dix-huit ans, m’a clairement envoyée en kiné du sport.
C’était la première formation que j’ai faite en kiné, c’était vraiment pour le sport d’équipe parce que j’adorais ça et que je voulais soigner les gens qui s’y blessaient.

Beaucoup de mes choix ont fait des ponts entre ma vie professionnelle et ma vie personnelle.
C’est ce qui fait ce que je suis aujourd’hui.

Course à pied, basket…Y-a-t’il d’autres sports dans lesquels tu t’es investie grandement ?

Anne Gass :

Je fais de la natation aussi.
C’est surtout pour décharger certaines de mes séances de courses à pied quand je prépare un objectif.

Ça peut être intéressant, parfois, de décharger certains entraînements pour faire du vélo ou de la natation, si tu cours beaucoup dans la semaine.
Le vélo je n’aime pas ça !
Mais je fais de la natation.

Je ne fais pas d’autre sport, mais tous m’intéressent.
J’ai toujours porté beaucoup d’intérêt, surtout lors des grandes compétitions.

Niveau course à pied, tu cours plutôt sur du court ou du long ?
J’ai souvenir que tu faisais plutôt de la route que de la montagne…

Anne Gass :
Jusqu’à aujourd’hui je faisais surtout une heure, un petit dix kilomètres, quelques fois par semaines ou une fois de temps en temps quand ça me prenait de prendre mes baskets et d’aller courir.
Plus récemment, je prépare le semi des courses de Strasbourg .

J’ai donc une préparation plus encadrée et régulière.

Lors de la Clinique du Coureur, quand j’étais en formation au Québec, on nous avait inscrits au trail de la Clinique du Coureur.

J’ai découvert le trail à ce moment-là, et j’ai vraiment accroché à la course en montagne.
Je pense qu’après mon semi, je vais  me tourner vers le trail, voir peut être un peu de triathlon si l’avenir me fait aimer le vélo.

La Clinique du Coureur, c’est un organisme de formation professionnelle, mais ils ont aussi des outils pour le grand public, des fiches pour expliquer la physiologie, des exercices spécifiques pour les problèmes récurrents, des plans d’entraînement pour préparer un cinq, dix kilomètres ou un ultra-trail…

Anne Gass :

À la base c’est un organisme qui a à sa tête des physiothérapeutes. Le titre de kinésithérapeute n’existe pas en Amérique du Nord. On parle du physiothérapeute, et les études diffèrent aussi.

Ils ont eu comme volonté de promouvoir la santé par la course à pied.

Au départ, ils ont créé le concept de prévention des blessures pour s’ouvrir aux professionnels et vraiment amener toutes les connaissances scientifiques qu’on a aujourd’hui et qui peuvent prouver que l’on peut agir sur certaines choses en termes de prévention..
Aujourd’hui ils se sont ouvert à promouvoir leurs actions dans des grandes courses, ils font des conférences où les particuliers peuvent y accéder.

Ils forment des professionnels de santé, et non seulement des kinés, mais aussi des physios, des médecins, des podologues…
Tous les professionnels de santé qui veulent se spécialiser en course à pied, comme des préparateurs physiques. Ils sont très ouverts.

Leur but est vraiment de véhiculer tout ce que la science nous prouve sur la course à pied, sur les chaussures, sur la prévention.
Ils ont ouvert cette connaissance à tout le monde pour que les idées puissent être véhiculées à travers le monde.

La course à pied est bonne pour la santé, il ne faut pas hésiter à courir !
C’était vraiment leur idée au départ.

Sur le site internet, il y a énormément de choses qu’on peut trouver.
Des conseils jusqu’aux exercices lorsqu’on est blessé.
Ensuite, les praticiens formés par la Clinique du Coureur sont référencés sur leur site.

Anne GassQuel est le pire conseil que tu aies entendu ?

Anne Gass :
Quand j’ai commencé à véhiculer l’idée de la Clinique du Coureur par rapport au minimalisme, je l’ai partagé à plusieurs coureurs de mon entourage qui couraient avec des grosses chaussures.

Un jour, on m’a répondu qu’il valait mieux prendre des grosses chaussures bien rigides pour protéger son pied que d’essayer de modifier sa façon de courir avec de nouvelles chaussures qui sont plus basses.

C’est n’importe quoi !

Je m’en rappellerai toujours, parce que c’était le choix de la facilité.

Et en effet, c’est ce que beaucoup de coureurs font, finalement.

Courir avec des grosses chaussures, plutôt que de s’intéresser à la technique qui peut vraiment améliorer ses performances, sur du long terme, et éviter des blessures.

Voilà un des pires conseils que j’ai entendu.

Si tu pouvais te rencontrer quand tu avais vingt ans, quels conseils te donnerais-tu ?

Anne Gass :
Pour rester dans le domaine de la course à pied je dirais : va courir au naturel et enlève tes sabots, tu auras moins mal partout.

À l’époque tu n’étais pas du tout sensibilisée au fait d’avoir des chaussures plus légères ?

Anne Gass :
Pas du tout.
Je m’en rappelle bien.
Je courais peut-être une heure, une dizaine de kilomètres.
Je courais beaucoup plus vite qu’aujourd’hui.
Parfois, même quand je courais moins d’une heure, je finissais toujours en ayant mal aux genoux. Parfois je courais bien moins qu’une heure et je finissais toujours mes courses en ayant mal aux genoux.
C’était quelque chose de commun.
À l’époque, quand je faisais du sport, je me disais qu’on a toujours un peu mal partout.
C’est aussi une idée reçue.
On n’est pas censé avoir toujours un peu mal partout !
Je me donnerais ce conseil, parce que ça fait partie des choses qui ont un peu révolutionné ma vision des choses.

C’est testé et approuvé personnellement : je n’ai plus mal aux genoux.

Aujourd’hui, quelles sont les trois valeurs qui animent ta vie ?

Anne Gass :
Bien manger, c’est profiter de la vie.
Le plaisir vient en courant comme en mangeant.
Faire du sport c’est prendre soin de soi, ça irait plus avec les deux premiers.
Le dernier :
Être entouré c’est toujours mieux. Plus on est, mieux c’est.
Plutôt que de se battre contre soi même.

Quand tu parles d’être entouré qu’entens-tu par là ?

Anne Gass :
C’est toujours mieux de faire du sport à plusieurs que de le faire toute seule.
Ça vient peut-être du fait que j’ai fait du sport d’équipe avant d’aller vers des sports individuels, comme la course à pied.
Mais finalement, en course a pied, on peut aussi être entouré, et je trouve ça bien mieux.
C’est plutôt un concept que j’ai.

C’est particulier la solitude en course à pied.
Sur route, j’ai quand même l’impression qu’on est rarement seuls.
J’ai fait quelques marathons, il y a toujours du monde : public et coureurs.
Mais en montagne c’est différent.
Au départ, nous sommes des centaines, voire des milliers.
Ensuite, nous sommes plutôt seuls.
Et finalement, à l’arrivée, nous avons l’impression d’avoir vécu une aventure collective.

Anne Gass :
Je suis plutôt d’accord avec toi.
Après, dans l’idée de ce concep- là, c’était plus parce que j’ai souvent eu des retours, que ce soit de moi-même ou des amis coureurs ou triathlètes, c’est que, pendant les périodes d’entraînements, c’est souvent difficile.
On s’entraîne seul, et ces périodes semblent très longues.

Suivant les objectifs qu’on peut avoir, on ne peut pas s’entraîner avec tout le monde.
On se retrouve donc parfois seul, et courir en solo, ce n’est pas toujours très marrant.

Je trouve que le sport, c’est un plaisir qu’on peut en plus partager. Donc autant le partager !

Est-ce qu’il y a une question que tu aurais aimé que je te pose ?

Anne Gass :
J’ai réfléchi et j’en ai trouvé une : est-ce que je cours et est-ce que je me blesse ?
Oui, mais je ne me blesse jamais.
Avec un grand sourire ! (rires)

Je n’ai plus mal aux genoux, mais ce n’est pas pour ça que je ne me blesse plus.

La course à pied reste un sport technique.
Être progressif, ce n’est pas facile non plus, il faut s’y tenir.
Ça m’arrive aussi de me blesser.
Mais j’en ai beaucoup moins que je pouvais avoir à une certaine époque.
En étant progressif, on met juste plus de temps à se préparer, mais on se blesse moins.

J’ai l’impression que la blessure – je fais aussi des arts martiaux c’est peut être pour ça – c’est un enseignement.
Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, il faut le corriger. Ce n’est pas une punition, mais une sanction avec un enseignement.

Anne Gass :
Exactement.
C’est très intéressant de le comprendre.
Et ça permet de répondre à ces fameuses questions que tu me posais tout à l’heure sur ces coureurs qui courent bizarrement et qui finissent toujours blessés.

C’est une question d’éducation.

Il faut éduquer les gens.
Une blessure n’est pas une punition.
Il ne faut pas juste se soigner et continuer à courir de la même manière.
Mais essayer de comprendre quelque chose à travers cette blessure, comprendre ce que le corps nous dit.

Est-ce que tu aurais un livre à conseiller ?

Anne Gass :
Celui du dirigeant de la Clinique du Coureur, de Blaise Dubois sur la prévention des risques de la course à pied.
Il donne des règles d’or et bouscule les codes qu’on peut avoir reçus.
Ensuite, ce n’est pas un livre pour apprendre quelque chose, mais c’est un très beau livre que j’ai eu la chance d’avoir reçu le livre : grand trail d’Alexis Berg.
C’est un très beau livre de photo sur des traileurs qui ont couru dans des endroits incroyables.
Je le conseille à ceux qui sont amoureux du trail.


Celui de Blaise Dubois est pour le grand public ? Pas besoin d’avoir fait trois ans d’études ?

Anne Gass :
Oui.
La Clinique du Coureur véhicule vraiment des informations qui sont accessibles à tous.

Il y a aussi Frédéric Brigaud qui a écrit quelques petits bouquins qui peuvent être intéressants, mais c’est un plus technique.

Oui, j’avais lu « La course à pied ». Il parle beaucoup de biomécanique.

Anne Gass :
Exactement.
Ce n’est pas forcément des livres que je conseillerai à tout le monde.
Pour les professionnels, ça peut être intéressant.
Mais comme je dis, il faut toujours lire en se posant les bonnes questions.

On peut te retrouver sur l’annuaire des professionnels de santé sur le site de la Clinique du coureur.
Maintenant il y en a un peu partout en France.
Dans les alentours de Strasbourg vous êtes au moins deux donc n’hésitez pas.
On arrive à la fin de l’interview.
As-tu un mot de la fin ?

Anne Gass :
Prenez vos chaussures et allez courir, ça vous fera du bien !

Et pour les plus téméraires, ils peuvent même y aller sans prendre leurs chaussures !
Merci à toi Anne !

Pour courir encore un peu plus loin


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Commentaires

2 réponses à “La Clinique du Coureur : halte aux croyances !”

  1. Merci pour cette interview. Au fil de mes lectures, j’en viens aussi à rechercher des chaussures plus naturelles avec moins d’amorti. Depuis que je suis le programme d’entraînement d’Eric Orton pour la prépa de mon 1e trail de 46km, je fais aussi des exercices de renforcement musculaire et de proprioception. J’ai vu la différence (négative) lorsque j’ai arrêté de les faire avec le retour d’une douleur au genou droit. Depuis, j’ai retenu la leçon et je refais de façon assidue ces 15 à 20 minutes d’exercices chaque jour. Pour ceux que ça intéresse, j’en parle sur mon blog : https://recettes-de-sportif.com/defi-2019-m01-mon-nouvel-outil-de-renforcement/

  2. Merci pour ton commentaire et ton partage !
    Je te souhaite de belles aventures pour ton 46km…
    Je parlerai d’exercices de renforcement musculaire et de proprioception, mais avec une approche peu courante…
    Un jour / Bientôt… !
    Prend soin de toi, mais pas trop, juste ce qu’il faut !