Marcher et jeûner dans les Vosges !

Du 7 au 11 septembre 2019, 6 aventuriers et aventurières en herbe se sont lancés dans un jeûne de 5 jours. 5 jours sans manger, mais autrement remplis grâce à des randonnées, des conversations animées à propos de mode de vie et d’alimentation, et des partages en tous genres. 5 jours à faire connaissance, à devenir amis autour de cette expérience partagée, à la fois corporelle, émotionnelle et poétique.

Nous nous sommes nourris pendant ces 5 jours, mais d’une manière quelque peu différente et inhabituelle.

7 personnages composent cette histoire :

– Mickaël, 27 ans. Le randonneur qui nous a guidés à travers les Vosges. Il est le créateur du site Courir un trail, il a participé à la première édition de « Jeûne et trek » organisée par Florian Gomet en avril 2019.

– News (ou Jérôme), 40 ans. L’habitué du jeûne, de l’alimentation crue et des Rencontres de la régénération. Il a vastement partagé ses expériences et connaissances sur le crudivorisme, la santé et l’hygiénisme, tout au long de la semaine…

– Bilge, un vigoureux Belge de 40 ans, qui nous a rejoints à vélo depuis Bruxelles, au point de départ du Jeûne et trek. Il a soutenu chacun et chacune avec son énergie, sa gentillesse et sa bonne humeur permanente.

– Michelle, 25 ans. Future prof de Yoga et déjà diplômée de permaculture, qui a pris l’avion depuis l’Irlande pour faire connaissance avec nous et ne pas manger pendant 5 jours ! Un rayon de soleil même dans le brouillard.

– Philippe, 62 ans et coureur, marcheur, nageur. Il est venu de Paris, en covoiturage avec Michelle, et nous a offert un splendide moment poétique autour du feu lors de notre nuit en refuge non-gardé.

– Elodie, 36 ans. C’est moi… La compagne de Mickaël. J’ai voulu vivre cette aventure après l’avoir vu rentrer si épanoui et heureux de son édition beaujolaise de Jeûne et trek, organisée en avril par Florian Gomet.

Et Leïla, la sœur de Mickaël, qui nous a accompagnés sur notre randonnée du jour 2, et qui nous a soutenus sur le plan logistique à plusieurs reprises !

C’est parti  ?

Jour 1 : le groupe prend sa propre température.

30,5km
Point haut : 1366m / Point bas : 410m
Dénivelé : 1211m+/1243m-

La veille du premier jour, nous nous rejoignons tous et toutes à Luttenbach-près-Munster. Nous disposerons pour la semaine d’un local simple mais confortable, dans lequel nous pouvons placer nos sacs de couchages et matelas, prendre une douche et utiliser les sanitaires. Le luxe ! Surtout pour moi qui vis en van aménagé depuis un an et demie… (avec Mickaël, of course)

Certains d’entre nous prennent une purge vendredi soir, la veille du départ. Philippe, Michelle, Mickaël et moi-même. Pour que nos intestins soient libres et vidés pendant les 5 jours qui suivront. Nous connaissons tous les effets nettoyants de l’huile de ricin, mais néanmoins, chaque purge est une nouvelle aventure !

Et en effet, la nuit est agitée.

La porte des toilettes grince, nous ne dormons pas, ou très peu.

Au réveil, nous faisons l’état des troupes.

Philippe a souffert plus que d’autres des effets nettoyants de sa purge, il est donc particulièrement fatigué au réveil. Nous décidons donc de rentrer dormir au local le premier soir, permettant ainsi de passer une deuxième nuit confortable et plus « assurée » que si nous allions comme prévu dans un abri de forêt.

Nous savons tous qu’il est possible d’être rapatrié par Leïla, la sœur de Mickaël, qui a accepté d’être notre soutien logistique en cas de fatigue excessive ou de foulure (et autres inconvénients possibles de la marche…) Néanmoins nous partageons tous l’envie de vivre cette aventure jusqu’au bout, ensemble.

La première journée est splendide. Nous découvrons (ou redécouvrons) le Sentier des Roches, qui offre un paysage spectaculaire. J’ai l’impression de faire partie de la communauté de l’anneau, en route vers le Mordor.

pause randonnée

C’est le week-end, il fait beau, nous ne sommes pas seuls sur les chemins. En fait, nous croisons pas mal d’auberges bien remplies, ce qui nous fait beaucoup sourire. Nous regardons les menus en passant… Nous rencontrons même un groupe de jeunes gens marchant bière à la main, une amusante dissonance par rapport à notre jeûne !

Mickaël marche pieds nus presque toute la journée, suscitant des commentaires tantôt admiratifs, tantôt inquiets, de la part des promeneurs que nous croisons. Français, allemands ou anglais.

Nous remplissons nos bouteilles d’eau dans des sources à même la montagne. L’eau est vivante, délicieuse et fraîche… On sent à quel point elle peut nous nourrir, à elle seule. Bilge pour sa part, souhaite rester en jeûne sec (sans boire) durant toute la première journée et une partie de la deuxième, ce qui est assez impressionnant, car son énergie semble infinie !

Une petite équipe de 4 personnes ira se baigner dans une rivière en fin de journée, pour délasser les corps : Mickaël, moi, Michelle et Bilge. Philippe et News préfèrent nous regarder d’un air amusé, pendant que nous nous exposons à une eau vraiment très froide. Petit clin d’œil à la méthode Wim Hof, un homme qui a exploré et démontré tous les bénéfices du froid sur la santé humaine.

Chacun y va à sa manière.

– J’immerge le bas de mon corps un certain temps, jusqu’à m’être habituée à la fraîcheur.

– Mickaël est plus direct, il reste les pieds dans l’eau et le corps bien au sec, avant de se plonger sous l’eau jusqu’au sommet du crâne.

– Bilge y va progressivement…

– Michelle prend quelques minutes pour se préparer mentalement, avant de se jeter tout entière avec le sourire.

En parlant de Michelle… chaque matin et chaque soir pendant ce Jeûne et Trek, elle pratique la méditation.

En tant qu’Aïkidoistes, Mickaël et moi sommes aussi sensibilisés à cette pratique silencieuse. Nous avons donc envie de suivre Michelle dans sa méditation quotidienne. Une nourriture spirituelle supplémentaire se dessine pour la semaine, grâce à elle.

Lors de ce premier soir, Philippe et Bilge se joindront à la séance pour quelques minutes, le temps d’expérimenter les sensations de leur corps, dans l’assise silencieuse.

Michelle sera régulière dans sa pratique tout au long de nos 5 jours ensemble. Mickaël et moi nous joindrons à elle de temps en temps, plutôt le soir. Les matins de sommeil sont précieux, nous n’avons pas eu le courage de les écourter…

Jour 2 : Affrontons la pluie et le brouillard avec courage !

23km
Point haut : 1281m / Point bas : 415m
Dénivelé : 1018m+/1040m-

Le deuxième jour, notre groupe se dirige hardiment vers le Petit Ballon, tout en sachant que la journée sera pluvieuse et fraîche.

Après un sondage des énergies de chacun au réveil, la décision est prise : aujourd’hui encore, ce sera une randonnée en étoile, avec retour au point de départ. Pour privilégier l’unité du groupe.

Nous passons la journée dans le brouillard et la pluie, mais les paysages n’en sont pas moins magnifiques.

Nous croisons quelques marcheurs, beaucoup plus rares que la veille.

Lors d’une pause, Michelle nous fait remarquer à juste titre :

« Vous vous rendez compte qu’on est dans un nuage, là ? ».

Leïla nous accompagne pour cette journée, à jeûn elle aussi, avec ses deux adorables chiens, Anakin et Nourse.

C’est elle qui repère en premier la statue de la Vierge Marie, bien installée au sommet du Petit Ballon.

Sous la pluie, les bras écartés, Leïla annonce fièrement :

« Je vois la Vierge ! ».

De mon côté, je suis cachée sous un poncho rouge immense. Un enfant passe à proximité et dit à ses parents  :

« c’est le Père Noël » …en me pointant du doigt.

« Le père Noël et la Vierge Marie » …on dirait le début d’une histoire drôle…

Jour 3 : La montagne est belle, de jour comme de nuit…

13,5km
Point haut : 1270m / Point bas : 431m
Dénivelé : 955+/180-

Troisième jour : nous savons qu’aujourd’hui se dessine notre dernière opportunité de dormir dans un abri en forêt.

Toute notre équipée espère faire l’expérience d’une nuit en montagne, au moins une fois dans la semaine.

Nous partons donc pour un trek à proprement parler, qui nous emmènera au col du Hilsenfirst.

Le paysage est merveilleux une fois encore, et le soleil revient progressivement nous soutenir et nous nourrir. News (Jérôme) est un adepte des pauses en plein soleil. Comme Bilge et lui ont un rythme de marche un peu plus soutenu que le reste du groupe, ils s’en octroient quelques-unes en supplément des pauses communes.

Chaque moment de pause, au cours de ces 5 jours, aura été une forme de repas.

À chaque fois, les conditions sont réunies pour que nous soyons requinqués : nous sommes 6, heureux d’être ensemble autour d’une table ou allongés dans l’herbe, sur des rondins de bois ou encore sur des rochers, et nous absorbons tout ce que l’univers veut bien nous donner.

La lumière, l’air, les rires des autres, les odeurs de la forêt, le vent…


Lorsque nous atteignons notre refuge, il est environ 16h, encore relativement tôt dans la journée.

Mais le prochain abri possible est trop loin pour le rallier avant la nuit, nous décidons donc de rester sur place.

Nous cherchons du bois à faire sécher pour les prochains randonneurs qui viendront ici, et utilisons le bois laissé par les précédents pour faire un feu réconfortant.

Les pieds humides, nous nous mettons autour du poêle.

L’une ou l’autre paire de chaussettes brûlera au cours de la soirée, mais nous sommes tous ravis de réchauffer nos orteils.

Philippe sort de son sac un livre de poésie, et chacun d’entre nous en lira un ou deux extraits. C’est un moment merveilleux, de partage et de nourriture avec des mots. Il démarre avec Chateaubriand.

Le refuge et ses volets étaient si bien fermés que nous avons dormi un peu trop tard le lendemain.

Jour 4 – Dernière ligne droite.

32km
Point haut : 1264m/ Point bas : 485m
Dénivelé : 600+/1350-

Nous émergeons à 8h30, les oiseaux chantent depuis longtemps…


Il est temps de nous mettre en route, surtout si nous voulons arriver à notre camp de base avant la nuit, pour ce quatrième soir. Nous nous dirigeons vers le pied du Grand Ballon, puis vers le col du Markstein.

La journée s’annonce « costaud ». Du dénivelé, et pas mal de kilomètres à parcourir.

Le temps est agréable, c’est un bon point !

Vers quatorze heures, lors de notre traditionnelle pause au soleil, Michelle souffre du genou, et elle hésite à finir la journée. News lui prête ses bâtons de marche pour quelques heures, le temps d’arriver jusqu’au Markstein.

En route, la douleur se confirme : elle devra finir l’après-midi en jeûnant au calme, dans notre local Luttenbachois. Philippe profite du trajet de retour et de cette opportunité de se reposer quelques heures en fin de journée.

C’est la fin de notre jeûne qui se profile, nous sommes maintenant à moins de 24h de la reprise alimentaire. Et l’équipe restante a encore un bon 4 heures de marche à parcourir.

Il est environ 17h quand Mickaël, News, Bilge et moi-même nous remettons en marche, après avoir confié nos deux camarades à Leïla. Je m’encourage mentalement à « m’accrocher à mes chaussures » (minimalistes) pour les suivre, car mes trois compagnons sont de très bons marcheurs aux longues jambes.

Je suis un peu plus lente du haut de mes 1m60, et randonneuse beaucoup moins expérimentée.

J’apprécie le boost mental et physique qui vient de l’énergie des trois marcheurs que j’accompagne. Cela me permet de ne pas faillir, de ne pas souffrir de la fatigue même si elle est présente.

C’est un peu ça la magie de ce jeûne en marchant : l’activité physique nous permet de mobiliser notre énergie sur la marche, les montées, le chemin à parcourir…

Pas le temps pour le corps d’entrer en mode « nettoyage », de mettre un gros coup de fatigue pour nous dire « ha tu ne manges pas ? Eh bien on va nettoyer toutes ces cochonneries que tu as mangées depuis toujours… tu vas rester au lit, un peu, et te soigner… ».

Non, le corps n’a pas vraiment l’occasion d’imposer le repos, car on est mobilisés, actifs, nous avons un but. Qui occupe toutes nos capacités, il semblerait.

 

Même alors que nous ne mangeons pas. Même lorsque nous faisons un arrêt rêveur devant les framboises, et autres baies que nous présente la nature avec un soupçon d’impertinence, nous ne compensons pas spécialement par la consommation d’eau.

Pour ma part, j’aurai bu entre 0,5l et 0,75l d’eau par jour en moyenne…

Ce qui représente une assez petite quantité finalement.

Quand je suis en alimentation végétale crue, je bois généralement assez peu, parce que je mange des fruits qui sont très juteux et m’apportent le liquide et les minéraux dont j’ai besoin… Mais quand je mange de manière plus « traditionnelle », je suis le genre de personne qui peut boire deux ou trois litres de thé à la journée.

En n’ingérant pas de nourritures physiques, nos besoins en eau diminuent, et nous n’en sommes pas plus fatigués pour autant.

La dernière ligne droite de la journée s’annonce, mais c’est plutôt une « pente droite », à vrai dire.

Nous descendons de la montagne, encore et encore.

News a des chaussures à crampons, Mickaël et moi des chaussures et sandales minimalistes.

Même parcours, ambiance différente pour chacun.

En minimalistes, la descente est un petit jeu de glissades et d’équilibre entre les tas de feuilles, par moments. C’est ludique, j’aime beaucoup.

Nous arrivons bientôt en zone civilisée, et le béton refait son apparition.

TERRIBLE béton !

Au bout d’une heure et demie sur les trottoirs alsaciens, mes pieds souffrent énormément, ma hanche me gêne, je m’accroche pour ne pas pleurer. Et pourtant je ne suis pas douillette.

Mickaël me propose d’appeler Leïla à la rescousse… nous ne sommes plus qu’à 10 minutes du camp de base en voiture. Mais probablement une bonne heure à pied, vu mon rythme de marche endolori…

J’accepte la proposition avec soulagement, et toute l’équipe rentre en voiture cette fois-ci. Le charme des villages alsaciens ne les aura pas convaincus de s’infliger une heure de bitume en fin de journée, à 20h passées…

C’est alors une arrivée dans le calme, au local, où nous dormons pour la dernière fois avant de nous séparer.

Je m’allonge dès l’instant où je vois mon matelas, et je m’endors avant que la lumière ne soit éteinte.

Jour 5 – Divine reprise alimentaire

La reprise alimentaire est pour bientôt ! Quelle drôle de matinée, qui voit s’approcher la fin de l’aventure, et nos au revoir également.

Le temps restant sera consacré à des activités physiques « en douceur ». Michelle nous propose une initiation au Yoga, et Mickaël un petit cours d’Aïkido pour débutants, tout en souplesse.

C’est dans un parc de Luttenbach-près-Munster que nous menons ces deux séances, en plein soleil, pieds nus dans l’herbe.

Un dernier délice immatériel avant la reprise de l’alimentation physique.

News a une furieuse envie de marcher, il part donc pour quelques heures en solo vers Munster, la ville la plus proche, pour se dégourdir les jambes une dernière fois avant de nous retrouver.

Je n’ai ressenti aucune faim pendant ces 5 jours.

J’avais souvent envie de manger… Mais la différence entre ces deux sensations est aujourd’hui beaucoup plus claire pour moi. En marchant, mon esprit rêvait de melon, de pastèque, de poires bien juteuses…

Mais mon ventre ne réclamait rien de spécial.

Je me suis sentie, pendant cinq jours, comme le matin au saut du lit… Le ventre pas bien « réveillé », pas encore très intéressé par le concept de nourriture.

Mais j’ai rêvé de ce jus de légumes de la reprise, je peux vous le garantir !

Et nous avons parlé de nourriture toute la semaine, comme si cela nous motivait dans notre jeûne, étonnamment.

Réfléchir à ce que nous aimons manger, à ce qui nous fait du bien ou du mal, à ce que nous voudrions installer comme hygiène alimentaire… Ces sujets ne nous ont pas quittés. Nous nous sommes mutuellement inspirés à manger mieux, alors que nous nous abstenions.

Début d’après-midi, nous avons fait les courses nécessaires à cette reprise alimentaire en douceur, et Leïla, notre soutien de toujours dans cette aventure, nous prête son extracteur de jus pour l’occasion.

La recette ? Concombres, citron, gingembre, curcuma, pommes.

L’odeur est merveilleuse, le goût encore plus.

Nous prenons le temps d’un cercle de parole au moment de partager ce jus, le sirotant goutte à goutte pour ne pas agresser nos estomacs au repos depuis des jours.

Chacun s’exprime sur son ressenti à propos de la semaine. Nous sommes émus par les rencontres, les sensations, les découvertes sur soi et sur le monde.

Merci, Merci, les amis.

Si vous souhaitez participer à une prochaine édition de Jeûne et trek, rendez-vous sur le site web de Florian Gomet !


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Commentaires

5 réponses à “Marcher et jeûner dans les Vosges !”

  1. joseph braunson

    merci pour ce récit avec videos et respects aux participants

  2. J’ai beaucoup aimé le film que tu as fait, on dirait une bande-annonce qui donne envie de partir sur les sentiers !

  3. Elodie Honegger

    Merci 😀

  4. Bravo Mickaël pour ce projet que tu as mené à terme.

  5. Merci !
    Cela me fait penser que je ne suis toujours pas passé par chez toi… !!
    (tu vois, c’est toujours quelque part dans ma tête 😉 )